Stress au travail: mieux vaut prévenir que guérir

Par Cécile AZZARO

PARIS (AFP) – Le stress au travail, touchant près d’un salarié sur trois, doit être combattu par des mesures préventives d’amélioration des conditions de travail, et non traité seulement a posteriori au plan individuel comme le font nombre d’entreprises, a recommandé vendredi l’Institut National de Recherches et de Sécurité (INRS).

Selon une enquête européenne de 2005, 27% des travailleurs se plaignent de problèmes de santé liés à un travail stressant. 61% des Français perçoivent leur travail comme “fortement stressant”, selon une autre enquête, menée par le ministère de l’Emploi de 2003.

Pourtant, le stress au travail est encore faiblement pris en compte par les employeurs, qui renvoient souvent le problème hors du champ du travail, en l’attribuant à une éventuelle fragilité individuelle. Ils privilégient alors une action corrective, au travers de programmes de “gestion individuelle du stress”, souvent par des méthodes de relaxation.

Mais ils ne s’attaquent pas à la source du problème, souvent lié à l’organisation et au contenu du travail, à l’environnement physique ou socio-économique (concurrence) ou encore aux relations de travail, a souligné vendredi devant la presse Dominique Chouanière, médecin épidémiologiste et chef du projet “stress au travail” à l’INRS.

Il faut “démonter l’idée que le stress est forcément personnel, qu’on ne peut rien y faire et que ça peut être bon pour le salarié”, ajoute Valérie Pezet-Langevin, psychologue du travail à l’INRS.

Les effets sur la santé sont nombreux: douleurs musculaires et articulaires, fatigue, troubles du sommeil, mais aussi sensibilité accrue, crise de nerfs, violence, angoisse, mal-être.
Le stress entraîne aussi le recours à des produits addictifs (alcool, tabac, somnifères, anxiolytiques..), et s’il se prolonge, peut être facteur d’hypertension, de diabète ou d’obésité, et provoquer des maladies cardiovasculaires, des troubles musculo-squelettiques (TMS), des dépressions, ou des infections récurrentes.

L’INRS se refuse à parler de bon ou de mauvais stress, préfèrant faire la double distinction entre stress “aïgu” ou chronique, et stress choisi ou subi: Quand il est ponctuel et accepté par l’individu, ses conséquences sont plus supportables que s’il dure et s’il est subi,
souligne Mme Chouanière. Les ouvriers et employés sont les plus exposés, loin devant les cadres.
L’un des secteurs d’activité les plus touchés est celui des centres d’appels téléphoniques, où les télé-opérateurs doivent faire du chiffre, en étant fortement contrôlés.

“Mais une situation stressante chronique, même choisie, sera toujours délétère”, souligne Mme Chouanière: les cadres, qui subissent une surcharge de travail après une promotion pourtant choisie, sont souvent victimes de problèmes de santé, dont notamment l’infarctus du myocarde.

Pour inciter les employeurs à se mobiliser, elle rappelle que le code du travail oblige l’employeur à prévenir les risques professionnels et à protéger la santé des salariés.
Le stress a un coût pour l’entreprise, estimé à “1 milliard d’euros au niveau national”, ajoute Mme Langevin, évoquant les baisses de productivité et de qualité, l’absentéisme et le turn-over très fréquent, les accidents du travail, ou encore la dégradation de l’ambiance dans l’entreprise.

En 2000, le stress représentait 10 à 20% du budget de la branche accident du travail et maladies professionnelles de la sécurité sociale.

Un colloque sur la prévention du stress se tiendra les 1er et 2 février 2007 à Nancy, organisé par l’INRS.